J’ai consacré un précédent article sur les erreurs à ne pas commettre lorsqu’on se prépare à prendre la parole en public. Je ne vais pas me répéter. Si vous ne l’avez pas lu, je vous le conseille (cliquez sur ce lien si vous ne l'avez pas encore lu) :
Je vais juste reprendre ce bref passage en guise d'introduction :
Ne pas avoir le temps pour se préparer ?
Et vous vous êtes certainement dit en vous-même: “oui, c’est évident qu’il faut se préparer. Mais je n’ai pas le temps pour ça. J’ai tellement d’autres choses à faire”.
C’est peut-être vrai. Et c’est certainement faux. Je préfère reformuler en :”à quel niveau de priorité placez-vous votre intervention en public?” Si la réponse sur une échelle de 1 à 5 est entre 3, 4 ou 5 (5 étant le plus haut niveau de priorité), alors remplacez tout ce qui a un niveau de priorité inférieur par des moments de préparation et vous verrez que votre agenda vous permet de vous préparer.
Si votre priorité est 1 ou 2, OK. Ne vous préparez pas et contentez-vous du résultat obtenu. Il sera plus ou moins bon selon que vous soyez à l’aise avec les accidents de parcours et l’inventivité en direct. Certains sont très bons sans préparation. Il y a même un seuil intermédiaire où la préparation est moins bonne que de se lancer sans filet.
Mais comment savoir ?
Quelles sont les étapes de l’apprentissage et quels sont leurs effets sur ma présentation?
Il existe, d'après le modèle de Maslow, 4 étapes de l’apprentissage:
Ce schéma (illustré dans cette vidéo par Cyril Maitre) représente les 4 étapes de l’apprentissage selon Maslow.
Etape 1, je ne sais pas que je ne sais pas
Je me lance dans un pitch, plein de passion. Je ne gère pas tout mais je me raccroche à l’essentiel. Fort de ma passion, on trouvera mon passage intéressant. Peut-être un peu naïf mais je vais rallier des personnes à ma cause. Des personnes qui me ressemblent généralement.
Et selon si j’ai plus ou moins confiance en moi, je m’en sortirai plus ou moins bien.
Etape 2, je sais que je ne sais pas
Ca signifie que j’ai commencé à structurer mon discours avec une méthode.
J’ai essayé. Et là, horreur, je me juge. Mes mots ne viennent pas et c’est compliqué de retrouver une spontanéité qui m’allait pourtant si bien avant…
Pire, je ne sais pas trop si j’ai bien choisi ma technique ni pourquoi il faut faire ainsi. Je me dis peut-être qu’il vaut mieux pour moi ne rien préparer.
C’est en partie vrai car à cette étape, vous êtes moins efficace que sans préparation et beaucoup moins efficace qu’avec une bonne préparation.
Etape 3, je sais que je sais
Vous avez bien compris les techniques et vous vous êtes préparé. En répétition, ça vous semblait bien. Et content de vous, vous avez laissé là le travail en vous pensant prêt.
Cependant, 15 minutes avant de prendre la parole, le stress monte. Vous repensez en boucle aux étapes, vous stressez un peu, peut-être à cause de la technique. Peut-être que l’organisation a 15 minutes de retard et vous devez patienter un peu encore soit dans une loge vide soit dans une coulisse ou pire encore, sur votre chaise devant le regard d’autres personnes qui attendent votre intervention et qui s’ennuient un peu. Et, cerise sur le gâteau, un orateur passe juste avant vous et vous trouvez qu’il excelle dans son art. Vous vous jugez…
Les résultats sont mitigés. Bien que vous ayez gardé le fil de vos idées, vous n’avez pas été très spontané.
On vous a fait la remarque que c’était bien et qu’on a pourtant ressenti votre anxiété. Cela n’a pas été simple et vous vous dites qu’avec le travail que vous avez entrepris, peut-être que le jeu n’en vaut pas la chandelle.
Peut-être que ne pas préparer est mieux pour vous. Après tout, le message aurait été moins clair. Mais les gens auraient passé un meilleur moment…
Vous vous êtes juste trompé au moment où vous avez arrêté votre préparation.
Oui, vous avez compris la matière.
Oui, vous l’avez structurée.
Mais vous devez encore trop y penser.
Vous n’avez pas rendu cette étape “réflexive”.
Et lorsque vous êtes dans le “feu de l’action”, vous devez penser à ce que vous faîtes.
Vous ne pouvez donc pas rester connecté à votre auditoire.
Il vous manquait juste un peu de préparation supplémentaire.
Etape 4, vous ne savez plus que vous savez
Oui, vous avez répété et répété.
Vous avez accéléré le rythme et vous avez espacé les moments de répétition.
Vous avez répété à voix haute, dans différents endroits et devant différentes personnes.
Vous avez même changé de nombreuses choses, à de nombreux moments, en quête d’un discours précis, fort et fulgurant.
Vous vous êtes peut-être fait accompagné par un metteur en scène parce que l’enjeu de la portée du discours en vaut la peine…
Vos voisins pensent que vous vivez un jour sans fin tant ils vous entendent répéter la même litanie.
Vous êtes prêt!
Choisir la bonne stratégie de préparation
Voici un schéma que j’ai mis au point pour répondre à cette question:
Selon l’enjeu et mon intérêt personnel, une préparation vaut-elle le coup ?
Le Collaborateur
Mon enjeu personnel est faible & je ne recherche pas l’adhésion des autres.
Je participe activement aux discussions.
J’improvise mon intervention. Je m’exprime. Si tout le monde est d’accord, tant mieux. Si pas tant pis.
Je n’ai pas perdu de temps.
Temps de préparation nul.
Coût nul.
Gains: confirmer sa place dans un groupe.
Toutefois, si vous avez régulièrement envie d’intervenir mais que vous souffrez d’un stress trop important, si vous vous jugez ou que vous avez le syndrome de l’imposteur, essayez de petites interventions régulières.
Si cette anxiété est trop forte, sachez que de bons coachs peuvent vous aider à réduire le stress et à transformer ce qui en reste en bon stress, en stress mobilisateur et volontaire.
Est-ce que ça vaut la peine?
La réponse est oui. Et vous le savez.
Combien de fois avez-vous remarqué que les personnes qui arrivent le mieux à des promotions, à des accords de crédit supplémentaires ou à se tirer de mauvaises situations ne sont pas ceux qui en savent le plus mais bien ceux qui l’expriment le mieux.
Si vous avez des difficultés à vous exprimer, faites-vous aider. Se faire aider une fois pour être capable tout le temps, cela en vaut la peine non ?
Le Manager
Mon enjeu personnel est important & je ne cherche pas l’adhésion des autres.
Je me prépare bien. Mon intervention est irréprochable.
Certains me suivent (généralement les personnes qui me ressemblent) et d’autres pas. Qu’importe.
J’ai été crédible et je n’ai nul besoin d’adhésion.
Temps de préparation plus élevé.
Coût minimum.
Gain: crédibilité (et légitimité si le sujet est pleinement maîtrisé).
Je souhaite juste leur transmettre une information claire et précise. J’ai besoin que chacun sache précisément ce qu’il a à faire. Je suis dans l’action et les autres sont dans une position où ils doivent accepter ce que je propose.
Cela peut choquer certains Managers qui me lisent. C’est pourtant la stricte réalité. Si vous vous adressez à des subalternes dans une société pyramidale classique, vous n’avez pas besoin de l’adhésion.
Je ne dis pas que ça n’est pas mieux AVEC le consentement de vos collaborateurs.
Mais dans de nombreux cas, ce dernier est optionnel.
Nombreux sont les responsables qui l’ignorent et qui pensent qu’ils sont de bons leaders parce que leurs collaborateurs le leur disent.
C’est peut-être vrai… C’est peut-être de la flagornerie naturelle d’un subalterne à son chef.
En tout les cas, ça n’est pas le positionnement du leader qui lui, recherche le plein accord, mieux, la ferveur !
Le Présentateur
Le besoin d’adhésion est important mais pas d’autre enjeu personnel que le rythme et l’assentiment de l’auditoire.
Il n’est pas important que la structure soit claire ou bien tenue. Pourvu que tous soient AVEC l’orateur. Il faut du rythme, de la ferveur et être adapté à convaincre le plus grand nombre.
Dans ce cas, le fait de demander l’avis de plusieurs personnes et si possible des profils différents permettra une répétition suffisante. Surtout si le feed-back est sincère et qu’il sert à adapter immédiatement le discours et sa mise en scène.
Le Leader
Mon enjeu personnel est important car je suis impliqué dans un projet qui m’importe. Dans ce cas, il faut être un véritable leader. Avoir une vision claire, porteuse et adaptée à l’auditoire. Mais pas seulement. Il ne suffit pas de croire en l’idée, encore faut-il croire en l’homme, en la femme. Pour cela il est nécessaire d’être convaincant, précis, percutant.
Ces moments n’arrivent pas fréquemment dans le parcours d’un leader. Je vous conseille de vous préparer à marquer ce passage de votre carrière. Faites-vous accompagner par un professionnel de la prise de parole en public.
Ce projet nécessite l’adhésion de mon auditoire.
L’enjeu personnel et du projet en général est élevé.
J'y consacre du temps que je planifie. Cette tâche est aussi importante que les autres.
Investissement conséquent. J'ai décidé de me faire coacher. C'est à dire, une personne dont c'est le métier. Il a l'habitude et je vais gagner du temps.
Gains : Outre la crédibilité, je stabilise ma position. Je fédère et je cristalise une Vision Globale. Est-ce qu’avoir l’adhésion de son groupe, de ses investisseurs, de son CODIR, de ses salariés, de son association est un bénéfice suffisant pour vous?
Comme aurait pu le dire Edouard Baer:
Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise préparation. Il n’y a que des circonstances. Et là, tu prends la balle au bond, tu glisses les mots au fil des phrases car, nous le savons tous, les mots sont magiques pour qui sait les employer.
J’espère que cet article vous a plu.
Pour le savoir, merci de commenter en bas de ce dernier. Car votre avis compte beaucoup pour moi.
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A très bientôt,
Steve Delcourte
Formateur libéré
Pour l’Ours Bleu
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